Beaucoup d’entreprises sont en constante évolution et transformation. Je parle ici, de transformations culturelle, numérique, organisationnelle… qui viennent déplacer fondamentalement les lignes actuelles de travail. J’ai rencontré de nombreux dirigeants ayant travaillé sur le sujet et se retrouvant dans une impasse :
« J’ai mis en place tout ce qu’il fallait, j’ai montré une vision, ouvert les espaces, fournis des outils, fait accompagner mes équipes et ça ne tient pas dans le temps. Quand je délègue, ça ne marche pas, il faut reprendre derrière. Ces nouveaux modèles d’entreprises libérées ne fonctionnent pas. »
Honnêtement, je ne peux pas lui donner tort. Pourtant dans son propre discours se retrouve tous les germes de l’échec. Dans chacune de ses phrases, c’est le dirigeant qui a impulsé les actions, tout venait de lui systématiquement. L’enjeu est bien de créer une bascule auprès des salariés pour leur permettre de s’emparer de cette transformation. C’est pourquoi certains dirigeants d’entreprise libérée ont pris un congé de 2 mois à 1 an pour opérer clairement cette bascule.
L’outil et la technique seuls ne suffisent pas
Il y a pléthore d’outils et de techniques en tout genre dans tous les domaines pour modifier la gouvernance. Ce sont de très bons supports pour accompagner la mise en place de la transformation, mais ils ne sont pas le moteur de celle-ci.
En entreprise, il y a 2 niveaux de compréhension :
– Le niveau 1 ou extérieur : C’est tout ce que l’on voit, la structure, le métier, les processus, l’organigramme…
– Le niveau 2 ou intérieur : C’est tout ce qui est invisible, implicite, la culture, l’ambiance de travail, l’historique…
Dans la plupart des transformations, la maîtrise du niveau 1 est élevée mais le niveau 2 reste négligé. C’est souvent une question que l’on ne se pose pas, car on estime que la vision suffit pour impliquer les personnes. Mais la posture du dirigeant et des managers doit aussi s’aligner avec la transformation à venir, sinon les anciens comportements, issus de cette posture, reprendront le dessus.
La nature de l’entreprise
Quand je parle de nature d’entreprise, je parle de la manière dont est perçue l’entreprise. Intuitivement, qu’est-ce qu’une entreprise pour moi ? Que vais-je mettre au centre ? Tant que cette perception reste floue pour le dirigeant, elle sera floue aussi pour les salariés, ce qui provoquera un blocage dans la transformation.
En simplifiant certains modèles (Spirale dynamique), on peut décomposer 4 grandes natures ou cultures d’entreprises
L’entreprise autocentrée
Dans cette entreprise, ce qui compte c’est avant tout la vision du leader ou du dirigeant. C’est souvent une personnalité charismatique qui impose et montre le chemin. Souvent pionnier dans son approche, il tire son organisation vers sa vision.
Dans ce type d’organisation, il peut être très difficile d’avoir une opinion divergente du leader à long terme et qui remette ses décisions en question. Chacun doit s’aligner et travailler pour créer la vision de ce leader. Les prises d’initiatives sont peu présentes et doivent être soumises au contrôle du dirigeant. Si la structure ne permet pas une proximité, une confiance relative s’opère mais il ne faut pas dévier trop des actions du dirigeants.
L’entreprise technique
Dans ce type d’entreprise, la rentabilité et l’aspect financier comptent avant tout. L’argent est le moteur de l’entreprise. Si elle n’est plus rentable, elle meurt. On peut voir l’entreprise comme une belle mécanique bien huilée. Si l’on place les bons rouages au bon endroit en huilant chaque partie, au moment du démarrage, tout fonctionne impeccablement. Le mode projet émerge également afin de créer du lien entre les services.
Dans ce type d’organisation, on retrouve l’organigramme formel et les services supports ont une grande place. Chacun a son rôle et doit être vecteur de la réussite de l’entreprise. Le pilotage se fait suivant des tableaux de bords chiffrés qui peuvent être déconnectés de la réalité du terrain. L’humain est aussi un chiffre qui peut être remplacé s’il est défaillant. Les prises de décision se font au sommet de la pyramide, argumentées par des chiffres.
L’entreprise humaine
Les valeurs et le collectif sont placés au centre de ce type d’organisation. Ce sont les valeurs qui guident nos choix dans les clients, les fournisseurs, les partenaires… Les relations prennent aussi une part importante et sont intégrées dans la prise de décision. Un modèle collaboratif et générateur d’intelligence collective émerge.
Dans ce type d’organisation, on retrouve des modèles de cercles comme en sociocratie et une forte adaptation, liée aux méthodes agiles. L’entreprise est un collectif dans lequel chacun a un rôle à jouer, et où personne n’est laissé de côté. Les prises de décisions sont prises par consensus ou consentement au maximum. Le bonheur au travail prend une part importante. L’économie sociale et solidaire (ESS) et la responsabilité sociétale des entreprises (RSE) sont issues de ce type d’organisation.
L’entreprise vivante
Voici le dernier modèle encore émergeant. Cette fois l’entreprise est perçue comme un organisme vivant à part entière. Tel un enfant qui a sa propre mission et son propre chemin, en tant que parent, notre rôle est de l’accompagner pour accomplir sa raison d’être. Le parallèle est fort, les salariés, dirigeant y compris, se mettent au service d’une entité plus grande qu’eux, l’entreprise. Cette entreprise a sa propre raison d’être et son propre chemin. Notre rôle est de les capter et de les suivre. Ce sont les modèles d’entreprises libérées et d’holacratie.
Chaque individu devient capteur de la vision et peut influer dessus. Le dirigeant n’a plus un rôle prépondérant sur cette vision, mais celui de vérifier que tout le monde reste aligné. Cela donne des équipes autonomes ayant toutes les compétences pour accomplir leurs missions. L’organisation évolue en fonction de l’environnement et des besoins de ces équipes. Chacun est libre de prendre la meilleure décision s’il est aligné avec la raison d’être de l’entreprise, en prenant un maximum d’avis.
Amorcer la transformation
L’erreur serait de percevoir un modèle comme supérieur, or ce n’est pas le cas. Chaque culture a ses forces et ses faiblesses. C’est l’environnement qui indique quel modèle est adapté ou inadapté en fonction du moment.
Chaque modèle porte en lui une organisation particulière dans laquelle il performe naturellement. Plus on aligne nature d’entreprise, gouvernance et prise de décisions et plus le modèle est efficient.
Il est indispensable d’être au clair sur ces notions pour changer son état d’esprit en fonction de ce que l’on souhaite, afin d’éviter au maximum les écueils de la transformation.
Reprenons l’exemple du début et du dirigeant qui n’arrive pas à mettre en place une transformation. Il est dans une posture autocentrée où il souhaite que ses équipes suivent une vision collaborative. Or, la première action nécessaire serait de changer sa vision de l’entreprise pour adopter une posture proche de l’entreprise humaine.
Comme on peut le voir, définir sa vision pour son entreprise et sa stratégie sont des prérequis indispensables à la réussite d’une transformation importante de l’entreprise. C’est même la première étape incontournable.
Et vous, comment percevez-vous votre entreprise ?
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